lundi 1 mai 2006

La non-interopérabilité et le refus de vente : les sénateurs veulent légiférer

Le (fameux) projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information va-t-il avoir des répercussions sur le commerce électronique ? On sait déjà que plusieurs dispositions tendent à renforcer le principe d'interopérabilité qui pourrait avoir un effet direct sur les plates-formes payantes de téléchargement.

Voici qu'un amendement déposé au Sénat risque d'aller encore plus loin. Le Sénateur Yann Gaillard (UMP) a déposé un amendement (n° 45) tendant à modifier l'article L. 122-1 du Code de la consommation applicable en matière de refus de vente.

Selon cet amendement, un nouvel alinéa lui serait ajouté indiquant que :

Un service de vente ou de mise à disposition en ligne d'œuvres, interprétations, phonogrammes, vidéogrammes ou programmes audiovisuels, doit accepter les transactions avec tout logiciel client interopérable. Tout dispositif d'exclusion, dont la présence n'est pas techniquement nécessaire pour réaliser la transaction, est assimilable à un refus de vente.


Constituera donc un refus de vente le fait pour une plate-forme payante de vente de musique en ligne (mais également de VOD, etc.) de ne pas être accessible par tous les systèmes d'exploitation, les navigateurs ou lecteurs multimédias.

On peut s'interroger sur cette disposition. En effet, elle transforme (pour certaines situations) en infraction purement matérielle le refus de vente alors que les juges ont toujours recherché l'intention du vendeur de refuser de la vente et la présence ou non d'un motif légitime.

N'aurait-il mieux pas valu laisser la sanction naturelle s'appliquer à savoir la sanction économique du consommateur : si celui-ci n'arrive pas à accéder au site ou n'a pas les lecteurs adéquats, il n'achètera rien ! C'est plutôt cette perte de chiffre d'affaire qui incitera le cyber-marchand à être accessible à tous les systèmes d'exploitation.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Votre conclusion me laisse perplexe.

Pensez-vous réellement qu'un utilisateur d'ordinateur a la liberté de l'utiliser comme il le veut ?

Que ce soit une liberté réelle (qui disparait de plus en plus chaque jour (CLUF, DRM, etc.), ou inéxistante dans un cyber-café), ou une question de capacité (combien de personne savent installer un autre navigateur que IExplore ? Combien savent qu'ils en existe un autre ? deux autres ? Trois autres ? etc.)

Je me pose la question de savoir si avec une telle loi, le marché aura la possibilité de s'auto-réguler, car loin d'assurer l'équité, elle penche vraiment d'un côté. Beaucoup de consomateur n'aurons pas la capacité (psychologique, financière, etc.) de jouer ce jeu, et préfèrerons ne pas suivre ses règles.

Et quand bien même.

Combien de coups de gueule, de campagnes, de procès, de condamnations auront lieu avant que le marché s'auto-régule ?

Je pense que considérer qu'un vendeur puisse obliger un client à utiliser un produit d'une certaine manière et pas d'une autre est une mauvaise chose. Qu'un vendeur refuse de vendre un produit à un client qui réclame la liberté d'utiliser son bien comme il l'entend est un refus de vente (tiens je l'avais déjà écrit ;-))

Anonyme a dit…

Au dela de la capacité des utilisateurs à réellement choisir leur systeme, leur player, leur navigateur...

Quelle entreprise va avoir les reins assez solides pour pouvoir s'offrir, dans le cadre de la VOD ou de la MOD, par exemple, une interface et une plateforme qui soit absolument compatible avec tous les formats et standards que l'on peut trouver sur le marché ?

Si même Apple menace de fermer son iTunes Music Store, (même si des raisons économiques diverses justifient en fait cette menace) qui pourra se permettre de créer un systeme de distribution qui soit totalement inter-opérable ?

Cela représente des coûts absolument colossaux. La concurrence serait donc tuée par les dispositions qui devaient en assurer la survie ?

Anonyme a dit…

Il n'est pas nécessaire de supporter trente-six formats pour être intéropérable. Il suffit de supporter les formats qui ne sont pas fermés et propriétaires, autrement dit des formats libres (vorbis, theora, ogg) ou standard (h264 etc.). Ces formats sont supporter (effectivement, après ajout d'un greffon, ou potentiellement) par tout logiciel.

Beaucoup choisissent les formats pour leur capacité à gérer la DRM. Un format libre est un format ouvert, il n'y a aucune raison technologique pour qu'un format libre ne puisse pas gérer la DRM (même si personnelement je suis contre). Le DRM ne base pas son efficacité sur le secret mais sur des mécanismes de cryptage, la seule partie secrète étant la clé du vendeur.

Enfin, je ne pense pas que la concurrence puisse être tué si on la permet. Car sans choix possible de la part du consommateur, le concept de concurence n'est qu'un mot sur une feuille de papier.