La loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales a opéré un passage du principe d'irresponsabilité de la Poste à un principe de responsabilité encadrée des prestataires de services postaux. Cette modification était, notamment, une des conséquences de la création d'un régime de "responsabilité de plein droit" à la charge des acteurs du cyber-commerce.
Dorénavant, et en application des articles L. 7 et L. 8 du Code des postes et communications électroniques, la responsabilité des prestataires de services postaux peut être engagée dans les conditions prévues aux articles 1134 et 1382 du Code civil pour les pertes et avaries survenues lors de la prestation. Néanmoins, le texte insère une limitation : "cette responsabilité tient compte des caractéristiques des envois et des tarifs d'affranchissement selon des modalités fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine des plafonds d'indemnisation".
Le décret fixant ces plafonds vient d'être publié au Journal officiel du 17 août 2006 (Décret n° 2006-1020 du 11 août 2006 pris pour l'application des articles L. 7 et L. 8 du code des postes et des communications électroniques et relatif au régime de responsabilité applicable aux prestataires de services postaux).
Concernant la perte ou l'avarie des envois postaux autre que les colis
Le texte prévoit plusieurs cas d'indemnisation.
Ainsi, la perte ou l'avarie pour les "envois ordinaires" sont plafonnées à deux fois le tarif d'affranchissement. Ce montant a été critiqué par l'ARCEP, l'autorité le trouvant trop faible compte tenu des difficultés imposées par le droit français en matière de preuve : il reviendra à l'expéditeur ou au destinataire de démontrer l'avarie de la lettre simple (possible) ou la perte de celle-ci.
Ensuite, pour les envois en "suivi", le plafond est fixé à trois fois le tarif d'affranchissement.
Pour les objets recommandés avec accusé de réception (les envois faisant l'objet de formalités attestant leur dépôt et leur distribution), le montant de l'indemnisation est plafonné à 16 euros. Sur ce point, une difficulté va poindre son nez. En effet, le décret du 17 octobre 1991 prévoit un mécanisme d'indemnisation particulier pour les envois en recommandé. Trois niveaux d'indemnisation existent : 8€, 153€ et 458€ correspondant aux taux R1, R2 et R3. Est-ce à dire qu'avec le nouveau décret, les plafonds prévus pour les recommandés R2 et R3 disparaissent ? Cela ne devrait pas être le cas. Pour l'ARCEP, ce décret implique que le service de base du recommandé (8€) devra dorénavant être indemnisé à hauteur de 16€.
Enfin, pour les envois en valeur déclarée, le plafond est celui du montant qui a été déclaré.
Concernant la perte ou l'avarie de colis postaux
En cas de perte ou d'avarie de colis postaux, l'indemnisation ne pourra excéder 23€ par kilogramme de "poids brut de marchandises manquantes ou avariées". Le poids brut s'entend du poids des marchandises augmenté de celui de leur emballage. En pratique, pour l'envoi d'un colis "simple" comportant un caméscope numérique, l'indemnisation ne sera pas bien lourde.
Définition de la perte de l'envoi postal
Le texte définit dorénavant la notion de perte d'un envoi postal. En pratique, l'envoi sera considéré comme perdu s'il n'a pas été distribué à son destinataire dans un délai de 40 jours à compter de la date de son dépôt dans le réseau du prestataire. Jusqu'à aujourd'hui, l'envoi était considéré comme perdu dès lors qu'une période de 21 jours s'ouvraient à compter du signalement de la perte aux services postaux.
A noter que l'ARCEP proposait un délai de 7 jours.
Concernant le retard dans la distribution
Le texte plafonne le montant des indemnisations en cas de retard dans la distribution au montant du tarif d'affranchissement.
A noter que le texte ne définit pas le "retard".
Exceptions aux limitations de responsabilité
Le décret prévoit, enfin, que ces plafonds ne s'appliquent pas si des stipulations plus favorables sont prévues par les conditions générales de vente ou par les contrats conclus entre les prestataires et les expéditeurs.
Au final, cette dernière disposition est sans doute la seule qui permettra à l'expéditeur, victime d'une perte ou d'une avarie, d'espérer obtenir une indemnisation équivalente sinon proche du montant du bien envoyé. Reste que les conditions générales de vente ou les contrats conclus avec les prestataires de services postaux sont rarement négociables et discutables.
Petite détail : il est intéressant de consulter l'annexe à l'avis de l'ARCEP rendu en la matière. On y retrouve la première version du projet de décret largement plus détaillée que celle finalement adoptée.
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