Comment peut on se rendre coupable de contrefaçon en proposant à la vente de vrais produits ? L'histoire met en scène la société Victoria Cashmere qui est titulaire de la marque "Victoria Couture" et qui a développé une ligne de vêtements en cashmere cobrandés "Hello Kitty by Victoria Couture". Au cours du mois de janvier 2007, la société découvre que Cdiscount s'apprête à lancer une vente flash pour des produits "Hello Kitty by Victoria Couture" avec une réduction de 60%. Le 14 janvier 2007, elle se connecte sur le site et constate que les produits sont bien offerts à la vente. Plus tard dans la journée, un bandeau vient recouvrir l'offre indiquant que "l'équipe des ventes privées de Cdiscount vous annonce avec regret qu'elle est dans l'impossibilité d'effectuer la vente".
Après quelques échanges entre Cdiscount et le titulaire des droits, ce dernier décide d'attraire le cybermarchand en justice sur le terrain de la contrefaçon de marque et de la concurrence déloyale. En première instance, il obtient gain de cause.
En appel, Cdiscount tente de démontrer que la vente a eu lieu avec l'accord du titulaire des droits, du moins par l'intermédiaire des sociétés auprès desquelles le cybermarchand s'est approvisionné. Seulement, par email, son fournisseur lui indiquait que "nous venons d'apprendre que vous présentez sur votre site internet cdiscount.com la vente de produits Hello Kitty mais nous sommes au regret de ne pouvoir vous retourner signé le contrat que vous nous proposez car il présente des conditions que nous ne sommes pas en mesure de garantir. La société Victoria Couture ne nous autorise pas à vendre sur votre site".
Ainsi, les juges ont estimé que Cdiscount, "en faisant un usage illicite de la marque protégée, susceptible d'avoir un pouvoir attractif, en la maintenant sur son site durant trois jours alors qu'elle était informée que la vente des produits de la marque ne pourrait avoir lieu, elle a contrevenu aux dispositions de l'article L 713-2 du code de la propriété intellectuelle et commis un acte de contrefaçon de la marque Victoria Couture préjudiciable à son titulaire".
Concernant le préjudice qui en découle, la Cour d'appel de Paris relève que "pour réparer le préjudice résultant des actes de contrefaçon, il ne peut être tenu compte des gains manqués dans la mesure où il constant qu'aucune vente n'a eu lieu et que l'annonce, durant trois jours, d'une mise en vente de 2.750 produits vendus à prix bradés n'a pu priver le titulaire de la marque de la possibilité de réaliser des bénéfices significatifs sur ses propres ventes".
En revanche, "l'avilissement du signe résultant d'une offre à la vente de produits de qualité à prix bradés jusqu'à 60 % est constitutif d'un préjudice par le titulaire de la marque". Les juges ont donc attribué 8000 euros au titulaire des droits.
Source : CA Paris, 22/10/2010, SAS Victoria Cashmere c/ SA CDiscount (inédit)
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