En effet, le dispositif de la réponse graduée repose sur l’envoi de messages d'avertissement aux titulaires d'abonnements internet ayant manqué à leur obligation de surveillance de leur accès à internet.
La première étape consiste dans l'envoi d'un mail d'avertissement par voie électronique au titulaire de l'abonnement à internet utilisé par la personne réalisant le téléchargement, la diffusion ou l'échange du fichier incriminé.
En cas de réitération dans un délai de six mois suivant l'envoi du premier avertissement, l'HADOPI peut enclencher la seconde étape de la réponse graduée : l'envoi d'un avertissement par message électronique, doublée d'une lettre recommandé. Enfin, et en cas de nouvelle réitération dans un délai d'un an, l'HADOPI informe le titulaire de l'abonnement par une lettre recommandée que ces faits sont susceptibles de poursuites pénales. Elle peut alors décider de la transmission du dossier au parquet.
Comme rappelé précédemment, l'ensemble du dispositif HADOPI repose sur l'envoi des divers avertissements à une seule et unique personne : le titulaire de l'accès à l'internet - qui demeure tenu en outre à une obligation de sécurisation de son accès Internet. Mais que se passe-t-il quand un salarié télécharge depuis son lieu de travail ? In fine, c'est l'employeur qui devient l'heureux destinataire des notifications.
L'employeur peut alors être tenté d'utiliser ces avertissements pour procéder au licenciement du salarié à l'origine des faits. En effet, l'HADOPI adresse une preuve d'un usage non professionnel d'outils informatiques mis à la disposition du salarié - à des fins professionnelles. En outre, le risque de poursuites pénales accroît la démonstration d'un usage non toléré par l'employeur. Mais, encore faut-il pour l'employeur, démontrer que l'auteur des faits est bien un salarié déterminé. Deux récentes décisions permettent d'illustrer cela.
Tout d'abord, un salarié avait été licencié pour faute grave à la suite de "téléchargements ou partages d'oeuvres en violation des droits d'auteur ont été constatés, par procès verbaux, tout d'abord le 1er mai 2013 à 11h16, le dimanche 5 mai 2013 à 18h16, puis le dimanche 1er septembre 2013 à 12h14, les faits ayant été commis à partir du logiciel Utorrent, et d'une adresse IP, expressément désignée et correspondant à la connexion internet [du PC sécurité d'un centre commercial]".
A la suite de la réception de ce courrier, l'entreprise avait décidé d'interroger l'ensemble des salariés afin de déterminer lesquels étaient présents aux dates et heures mentionnées par l'HADOPI dans son courrier. A l'issue de ces recherches, l'entreprise identifiait un unique salarié. Elle procédait à son licenciement. Ce dernier contesta, arguant notamment du défaut de sécurisation de l'accès à Internet.
Lors des débats, l'argument fit mouche. La preuve n'était pas aussi évidente. En effet, les juges relèvent que :
La diffusion de l'adresse IP depuis 2009 [comprendre: diffusion de codes Wifi inchangés depuis 2009] ajoutée à la possibilité de se connecter au réseau Wifi en dehors du poste de sécurité, caractérise ainsi une faille dans le système de connexion, empêchant de retenir que cette connexion devait nécessairement être effectuée depuis le poste de sécurité.Dans ces conditions, les juges estiment que l'employeur échoue à démontrer la seule responsabilité du salarié. Ils considèrent donc que le licenciement est dépourvu de tout cause réelle et sérieuse.
Autre exemple, un salarié avait été licencié suite à la réception par son employeur d'une courrier émanant de l'HADOPI concernant des téléchargements illégaux effectués depuis l'accès à internet de la société. L'examen du disque dur de l'ordinateur portable avait alors révélé un nombre significatif d'images et de vidéos téléchargées.
Dès lors que le salarié n'avait pas contesté cette utilisation du matériel professionnel lors de son entretien préalable, cette utilisation non professionnelle de l'outil professionnel est de nature à être prise en compte pour justifier un licenciement pour faute.
Source:
CA Poitiers, 20 janvier 2016, n° 2014/04579
CA Orléans, 21 janvier 2016, n° 2014/01448
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