lundi 25 juillet 2005

Smiley : souriez tant que vous pouvez !

A quelques jours avant les vacances, la Cour d'appel de Paris a rendu une décision qui pourrait avoir des conséquences non négligeables sur l'une des grandes pratiques de l'internet : l'usage du smiley.

Revenons quelques mois en arrière. La société SmileyWorld (qui notamment propose en téléchargement un plug-in de smiley pour les divers logiciels de messagerie instantannée du marché) avait saisi la justice française à l'encontre de deux grands acteurs de l'internet : Yahoo et AOL, leur reprochant la contrefaçon d'une "marque figurative déposée le 7 mars 1997 et composée d'un cercle dans lequel sont dessinés de manière stylisée : deux formes oblongues figurant des yeux et un arc de cercle terminé par deux traits perpendiculaires figurant une bouche" .. en résumé : un smiley.

En première instance, le Tribunal de grande instance de Créteil déboutait la société (contre Yahoo et AOL) de ses demandes estimant que "sauf à revendiquer la protection d'un genre figuratif, les demandeurs ne sauraient étendre la protections de leur marque à tout signe représentant un visage stylisé de forme ronde à l'air réjoui. (...) Ce visage souriant est inclus dans un ensemble de visages exprimant différentes émotions et ne présente aucune individualité propre. Il constitue, comme les autres représentations de visages, un véritable signe d'écriture utilisé dans sa fonction signifiante et courante, à savoir représenter un visage souriant, ce qui exclut tout risque de confusion pour le consommateur moyen qui ne peut rattacher ces signes à un quelconque service ou produit désigné par les marques figuratives déposées qui n'utilise manifestement pas son signe à titre de marque".

Dans l'appel formé dans l'instance engagée à l'encontre d'AOL, les juges parisiens infirment cette position. Ils estiment en effet que le site de "AOL Messager", une émoticône est reproduite avec les caractéristiques suivantes :
- une tête constituée d'un cercle ;
- des yeux représentés par deux points noirs en forme d'ovale ;
- une bouche formée d'un trait en arc de cercle barré à ses extrémités de deux traits obliques formant les commissures.

Partant de ce constat, la Cour d'appel relève que "si la bouche est légèrement entrouverte, cette différence de détail n'affecte pas l'impression d'ensemble identique qui se dégage de l'examen des deux logos". Il importe "peu que cette icône soit présentée parmi un ensemble de visages stylisés décrivant les humeurs, dès lors que chacun d'eux peût être utilisé séparément".

Les juges en concluent que "si les appelants ne peuvent se prévaloir de la couleur jaune qui n'est pas revendiquée, l'adoption de ce signe graphique pour désigner des services identiques à ceux visés dans le libellé de l'enregistrement est de nature à laisser croire au public qu'ils ont la même origine ou qu'ils sont fournis par des sociétés liées économiquement".

Une limite est néanmoins apportée par les magistrats qui estiment que "la protection accordée à ce signe ne peut s'étendre à toute représentation d'un visage rond stylisé quel qu'en soit l'expression".

Cette décision pourrait avoir une incidence non négligeable sur l'utilisation de ce symbole, accompagnant l'internet : le smiley.

Pour info :
- le smiley contesté d'AOL :
- le smiley de Smiley World :



3 commentaires:

Anonyme a dit…

date de l'arret?

Benoit Tabaka a dit…

Oups, un oubli. L'arrêt date du 22 juin 2005.

Anonyme a dit…

Où peut-on obtenir une copie de l'arrêt ?

N'est-il pas contestable d'accorder la protection d'une image qui était déjà connue et diffusée à grande échelle avant son dépôt ?

Ce fameux logo fut dès les années 60 diffusé par une compagnie d'assurance puis repris comme effigie pacifiste (Pour un historique du smiley, v. http://laboiteaimages.hautetfort.com/trackback/141719). Il a été distribué par milliers dans le monde sous la forme d'un badge (que moi-même possédais dans ma jeunesse !).

Même s'il y a eu dépôt, ne doit-on pas vérifier la condition de nouveauté pour accorder une quelconque protection à ce logo ?